2019, une année de rap



L’année 2019 clos une décennie qui aura vu le rap considérablement évoluer jusqu’à atteindre des sommets qui paraissaient encore inimaginables il y à dix ans. À l’origine de cet essor ; le développement d’internet, avec YouTube notamment, ainsi que l’arrivée des plateformes de streaming et de téléchargement légal. En France, l’année 2019 a été riche en productivité avec la sortie de près de 250 projets, dont ceux des plus gros noms du rap hexagonal. Entre révélations, confirmations et grands retours, tour d’horizon de la dernière année de rap francophone de la décennie.
Les révélations

Le 25 janvier, Heuss L’enfoiré sort son projet En esprit et se révèle aux yeux du grand public. Celui qui n’était alors connu que pour ses freestyles BX Land et pour son apparition dans l’émission Rentre dans le cercle de Fianso en 2017, avec qui il collaborera par la suite sur l’album Affranchis, va voir son album être très rapidement certifié disque d’or ; dès le mois de mars. Initialement connu pour son rap très cru, l’interprète de Moulaga se révèle finalement sur des titres beaucoup plus dansants. Aristrocrate et surtout Khapta, en featuring avec Fianso justement, resteront en effet comme deux des hits francophones de l’année.

Après avoir sorti sa première mixtape, Hostile, en 2018 et assuré les premières parties de la tournée de Damso la même année, 404Billy, jeune rappeur de 24 ans originaire du 95 nous a gratifié de deux projets réussis au cours de l’année 2019. Le 15 mars, il sort dans un premier temps Process, un opus qui s’inscrit dans l’univers très sombre qu’on lui connaissait et dans lequel il confirme tous les espoirs placés en lui. Dans ce projet, on ne retrouve qu’un seul invité mais pas des moindres, puisqu’il s’agit de Damso, avec qui il pose sur le titre RVRE. Ce dernier atteindra près de deux millions de vues sur YouTube. Quelques mois plus tard, le 13 décembre, Billy revient avec un nouvel EP intitulé Supernova, au sein duquel on retrouve une nouvelle collaboration de taille avec cette fois-ci PLK. Doté d’un rap cru, parfois brutal, de punchlines travaillées et de références poussées, 404Billy a profité de 2019 pour poursuivre son ascension. Celui qui se démarque également par des visuels toujours particulièrement travaillés et très « street », s’affirme ainsi de plus en plus comme une des jeunes prouesses du rap français.

Quatre ans après son dernier projet, Luidji est revenu le 26 avril dernier avec son premier album solo intitulé Tristesse Business : Saison 1. À travers cet opus musicalement très travaillé, à mi-chemin entre rap, soul et variété française, l’artiste de 28 a choisi de se livrer sans pudeur sur ses années de galères ; autant dans le monde de la musique que dans sa vie sentimentale et sur les émotions qui l’habitent désormais. Sa relation avec les femmes et en effet un thème omniprésent dans l’album mais pas le seul. Luidji n’hésite pas à plonger en profondeur dans l’analyse de ses sentiments afin de nous ressortir toute la mélancolie qui l’habite. En livrant ses émotions les plus justes, il soigne ainsi ses maux et signe, par la même occasion, son renouveau. Une belle prise de risque réussie donc de la part de l’artiste.

Après son très bon premier EP, Triple S, paru en 2018, ainsi que trois excellents singles dévoilés à la suite début 2019 ; Zidane, Amis d’avant et Petit cœur, le 13 Block a dévoilé, le 26 avril dernier, son premier album studio intitulé BLO. Le quatuor de Sevran livre à cette occasion un album solide où les trois singles se retrouvent accompagnés de morceaux mélodieux et bien écrits à la fois, ainsi que par titres plus brutaux tels que le retentissant morceau Fuck le 17, qui fera beaucoup parler pour son énergie hors-norme et ses paroles crues, parfois même à la limite, puisque certains extraits ont dû être censurés. Néanmoins, sur cet album, le 13 Block tente de s’éloigner légèrement de la trap brutale qui le caractérise pour s’essayer à de nouvelles musicalités plus légères et mélancoliques, parfois même dansantes. Avec cet album réussi où ils tentent de sortir de leur zone de confort, les quatre rappeurs parisiens confirment leur progression constante et s’affirment désormais comme un des groupes les plus influents du rap hexagonal.

Présent sur la scène rap depuis le début de la décennie déjà, Némir s’était jusqu’alors distingué par de (très) nombreuses collaborations avec Youssoupha, Nekfeu, Alpha Wann, S.Pri Noir, ou encore Deen Burbigo entre autres, mais jamais réellement en solo. Après un premier EP, Ailleurs, sorti en 2012, son premier album solo s’avérait très attendu depuis plusieurs années déjà. Mais celui qui est devenu au fil du temps le « chanteur » préféré des rappeurs a fini par sauter le pas en 2019 pour nous livrer, le 6 septembre dernier, un album éponyme. Sur ce projet de seize titres aux couleurs et aux musicalités très variées, Némir à rassemblé sa famille artistique de toujours pour nous évoquer sa jeunesse, sa relation fusionnelle avec sa mère – à qui il dédie notamment le titre Loin devant – et nous faire plonger dans son quotidien. Un album de rap singulier et un univers particulier, très apprécier dans le milieu, et qui mérite d’être écouté.

Révélé sur internet en 2017 après de multiples freestyles hebdomadaires publiés sur YouTube, Kikesa nous a offert son premier album studio, Puzzle, le 18 octobre dernier. À la tête du « nouveau hippie gang » comme il l’appelle, le jeune rappeur originaire de Nancy nous livre un rap léger mais à la fois rigoureux, en débitant des textes bien écrits et minutieusement calés sur la prod’. Avec des morceaux relativement différents les uns des autres, l’opus s’avère homogène tout en restant cohérant à travers le fil rouge de l’album ; chargé de relier toutes les pièces du puzzle.

Un an après la sortie de son premier album, C’est Rémy, Rémy est revenu, le 25 octobre dernier, avec son nouvel projet intitulé Rémy d’Auber. Sur cet album, le protégé de Mac Tyer nous fait part de son attachement profond pour sa ville d’origine, Aubervilliers, en témoigne notamment la campagne de promotion qui propose, à travers des affiches, de partir à la découverte de la cité francilienne pour 10,99 euros seulement (le prix de l’album). Sur cet opus de onze titres très introspectif et musicalement très juste grâce aux différentes mélodies de piano jouées, Rémy nous fait preuve, une nouvelle fois, de toute la finesse de sa plume.
Ils ont répondu présents

Hamza a été particulièrement actif en 2019 avec la sortie de deux projets, dont notamment son premier album studio, Paradise, sorti le 1er mars dernier. Sur cet album, le rappeur belge dévoile l’étendue de sa palette artistique, alliant trap, dancehall, afro-caribéen et R&B, le tout, saupoudré d’une touche de mélancolie. Malgré les différentes variations de styles, le projet reste homogène grâce à un rassemblement de ces-derniers dans l’album et une construction crescendo. On retrouve notamment cette structure sur le premier titre du projet, Le même sort, qui commence de manière plutôt chantée avant de finir par une production plus trap et plus sombre, qui nous plonge donc d’entrée de jeu dans l’album. Sur ce projet, Hamza a notamment regroupé tout ce qu’il avait fait de bien jusqu’à présent, tout en démontrant une certaine progression qui lui permet de s’affirmer comme une des nouvelles têtes d’affiches du rap francophone. Celle-ci se fait notamment ressentir en termes de tonalités, de backs et d’adlibs, qui renforcent la profondeur des morceaux, mais également en termes de flows rappés et chantés, qui nous offrent un projet global très maîtrisé. Les différentes punchlines présentent sur chacun des morceaux s’avèrent également davantage travaillées et ainsi plus percutantes. En termes d’invités, Hamza a de ce côté-là choisi de surprendre. Si l’on peut retrouver SCH sur le très bon morceau HS, les morceaux réalisés avec Aya Nakamura et Christine and the Queens s’avèrent en revanche plus surprenants mais demeurent tout aussi réussis.
Enfin, après une réédition de Paradise sortie 6 mois plus tard et composée de 8 nouveaux titres, Hamza a choisi de définitivement marquer l’année 2019 de son empreinte, en dévoilant, le 20 décembre dernier, une nouvelle mixtape intitulée Santa Sauce 2. Cet opus, qui s’avère être la suite du premier projet Sauta Sauce paru en 2017, fait figure de cadeau de Noël pour les nombreux fans de l’artiste qui cette fois-ci, a décidé de lâcher un projet plus « rap », rassemblent notamment deux phénomènes de la nouvelle génération : Koba laD et Gambi, le rappeur britannique Young ADZ et enfin son célèbre compatriote Damso, sur le single God Bless.

Après le succès de son premier album studio, Commando, sorti en 2018, Niska était attendu et a donc dévoilé Mr Sal, le 6 septembre dernier. Avant la sortie de ce deuxième album, le rappeur du 91 s’était néanmoins déjà montré très présent sur la scène rap, notamment à travers trois singles de qualité ; Médicament, Du lundi au lundi, La Zone est minée, ainsi que sur le désormais célèbre titre de Ninho, Maman ne le sait pas. Au sommet de son art, Niska a donc fini par lâcher un album dans lequel il conserve la recette musicale qui a fait son succès ; alliant mélodies autotunées et kickage hardcore. Ces thèmes jusqu’alors préférentiels que sont la rue, les femmes et l’argent, reste également les mêmes sur ce projet de vingt titres. Enfin, l’album est renforcé par des invités de qualité, avec qui Niska à, pour certains, l’habitude de collaborer ; on retrouve en effet Booba, Koba LaD ou encore Ninho, entre autres.

La tournée de son premier album solo, Polak, à peine terminée, PLK est revenu le 13 septembre dernier avec sa nouvelle mixtape, Mental. Et le rappeur parisien a une nouvelle fois régalé ses fans à coup de flow rapides et techniques, accompagnés de mélodies entrainantes sur des titres autotunés accrocheurs. Les singles Un peu de haine et Problèmes se sont notamment chargés de renforcer la notoriété ascendante du rappeur de 22 ans aux yeux du grand public, ces derniers étant, à ce jour, respectivement certifiés single d’or et single de platine. Les chiffres de ventes de Mental sont également sans équivoque ; sans promotion et pour ce qui n’est « qu’une mixtape », le projet s’est écoulé à près de 18 000 ventes en première semaine, plaçant ce dernier à la seconde place du Top album. Petit polak devient grand.

Depuis ses débuts en solo en 2016, Lefa ne cesse de s’affirmer et ce n’est pas son dernier album, Fame, sorti le 18 octobre dernier, qui dira le contraire. Sur ce qui s’avère être déjà son quatrième album solo, l’ancien membre de la Sexion d’assaut reste fidèle à ses qualités naturelles de kickeur, alliant flow rapide et technique, mais témoigne également d’une certaine progression en matière de flows chantés et de mélodies. Sur ce projet de 16 titres, le rappeur de 33 ans est une nouvelle fois parvenu à réunir des artistes de qualité tels que Caballero & JeanJass, Dosseh ou encore Vald. Toujours aussi inspiré, Lefa n’a également pas hésité à rendre des visuels travaillés, d’une très grande qualité, presque cinématographiques ; en témoigne le clip du très réussi single Bitch, en compagnie de Vald, certifié single d’or avant même la sortie de l’album. Sur cet opus, Lefa se livre à cœur ouvert, évoquant la notoriété, sa soif de réussite, mais également le comportement opportuniste des gens prêts à tout pour obtenir, ne serait-ce qu’un semblant de célébrité.

Après une année 2018 couronnée par un succès d’estime sans équivoque grâce à la sortie de son premier album studio, Imany, Dinos a signé son grand retour, le 29 novembre dernier, en dévoilant son second album studio, Taciturne. Celui qui se défini – à juste titre – comme « le mec que tout le monde aime bien mais qui ne vend pas beaucoup d’skeuds » dans On meurt bientôt, premier titre de l’album, mériterait en effet davantage de reconnaissance aux du grand public, tant son rap est juste et sa plume aiguisée. Dans cet opus, les multiples semples utilisés et les nombreuses références minutieusement placées sont là pour rappeler l’amour qu’entretien le rappeur de La Courneuve pour la culture hip-hop. L’album se différencie également de son prédécesseur par une certaine homogénéité ; Dinos varie les styles, les ambiances et les références tout en conservant l’authenticité qu’on lui connaît. On retrouve ainsi sans surprise, tout au long de l’album, le spleen qui semble habiter l’interprète d’Helsinki. Le nom de l’album ; Taciturne, parle pour lui-même. Le rap semble être le seul moyen pour Dinos, lui qui ne parvient pas à pleurer ni même à parler de lui, d’extérioriser ses émotions, ses doutes et ses questionnements. Avec cet album qu’on peut d’ores et déjà qualifier d’intemporel, Dinos semble avoir délivré un des tous meilleurs opus de l’année, tant au niveau de l’écriture, de la richesse musicale, ou de la grande diversité des thèmes abordés. Et tant pis si le grand public n’est toujours pas décidé à lui offrir le succès qu’il mérité, Dinos, toujours aussi juste et sincère dans son art, s’affirme comme un des tous meilleurs rappeurs/ auteurs de sa génération.

Après le succès de JVLIVS en 2018, SCH a soigné son retour avec son nouvel album, Rooftop, sorti le 29 novembre dernier. Sur ce projet plus classique et mainstream que le précédent, le « S » rappe ses thèmes de prédilections : le quartier, les halls, les femmes, les armes, ses origines, le tout avec le flow énervé qui le caractérise si bien. Il nous livre ici sa vie plus qu’une histoire. Rooftop symbolise en effet l’ascension du rappeur marseillais, parti d’en bas pour arriver tout en haut ; sur le rooftop. Le clip du single R.A.C, sorti deux semaines avant l’album, scénarise parfaitement ce qu’il se passe dans celui-ci. « C’est carrément incroyable mec ! ».

On ne les présente plus
Impossible de revenir sur une année de rap sans citer Jul ? En effet, depuis son premier album paru en 2014, le rappeur marseillais n’a pas clos une seule année sans sortir de projet(s). 2019 n’aura donc pas dérogé à la règle puisque ce dernier a livré 3 projets et une réédition en l’espace de douze mois. Le 1er mars, il a d’abord fait son retour avec Album gratuit vol. 5 disponible sur YouTube, puis a enchaîné avec Rien 100 Rien le 14 juin, la réédition quatre mois plus tard et enfin, C’est pas des lol, le 6 décembre dernier. Sur ces différents projets, le rappeur marseillais a choisi d’inviter de nombreux artistes comme Ninho, Vald, Heuss L’enfoiré, Gambi, TK, Moubarak ou encore le désormais célèbre producteur Vladimir Cauchemar. Vingt-huit titres sur Rien 100 Rien, quatre titres supplémentaires sur la réédition, puis 38 titres sur C’est pas des lol, en 2019, Jul a encore un peu plus inscrit son nom dans la légende, pour le plus grands bonheur de sa « team ».

Après le succès de ses mixtapes M.I.L.S et M.I.L.S 2.0 ainsi que de son premier album studio Comme prévu sorti en 2017, le retour de Ninho était particulièrement attendu en 2019 et s’est fait le 22 mars dernier avec la sortie de Destin. Après avoir teasé en janvier ce qu’il considérait, non sans ambitions, comme « l’album de l’année » lors du freestyle Binks to Binks 6, le rappeur du 91 a ensuite enchainé avec les singles Goutte d’eau, sur lequel il allie kickage et mélodie, puis Paris c’est magique, paru la veille de la sortie de l’album, qui s’avère quant-à-lui davantage être une tentative de « banger ». Dans son nouveau projet, Ninho explore de nouvelles mélodies entraînantes et souhaite se livrer davantage, comme il le dit dans La vie qu’on mène ; « je vais tout vous raconter ». Au final, nous raconte-t-il vraiment plus que ce qu’on savait déjà ? On n’en est pas certains, mais Ninho a quoiqu’il en soit su sortir un album de qualité qui correspond aux caractéristiques qu’on lui connaissait déjà ; notamment en termes de flows et de kickage. Certifié, à ce jour, triple disque de platine, Destin regroupe pas moins de sept artistes dont Koba LaD, Niska ou encore Jul, pour des featuring de qualité.

Le 5 avril 2019 restera comme une date forte de l’année, voire même de l’histoire du rap français ; marquée par la sortie du quatrième projet de PNL, Deux frères, et par toute l’émulation que cette dernière a suscité. Après un silence radio de plusieurs mois, les deux frères des Tarterêts annoncent, fin mars, la sortie de leur nouvel album à travers un nouveau coup de communication exceptionnel ; un live YouTube de 16 heures, où l’on peut observer l’évolution d’une planète ainsi que plusieurs indices rappelant l’univers très particulier du groupe, conclu par l’annonce du désormais célèbre clip, Au DD. Un visuel réalisé au sommet de la Tour Eiffel qu’ils se sont permis de privatiser, avec des plans dignes des plus grandes productions cinématographiques pour un rendu finalement spectaculaire. Et les chiffres sont au rendez-vous, avec près de 7,5 millions de vues en 24 heures et le record du morceau le plus streamé en un jour. L’album quant à lui, réponds à toutes les attentes ; éclectique et doté d’une grande richesse musicale, il offre une diversité notable. Les prises de risques d’Ademo et N.O.S s’avèrent payantes. Les mélodies plus sauvages du premier sont parfaitement suppléées par les mélodies plus souples du second et nous offrent ainsi de nombreux titres entraînants. L’album s’avère également musicalement travaillé, en témoigne la présence d’instruments tels que la guitare ou la batterie sur le titre Déconnecté par exemple. En termes de lyrics, les deux rappeurs franciliens ont également progressé, et même s’ils n’arrivent pas encore au niveau des plus grands, le spleen et la mélancolie qu’ils souhaitent nous transmettre sonnent justes ; Tarik et Nabil nous livre en effet ici l’album le plus introspectif de la carrière. Finalement, le succès critique de cet album est au rendez-vous, tout comme le public. Deux frères s’est écoulé à près de 400 000 ventes, le classant ainsi à la deuxième place des albums de rap les plus vendus en France au cours de l’année.

Comment clore l’année 2019 sans évoquer le retour tant attendu de Nekfeu ? Après trois années d’absences – seuls quelques featuring au compteur – le très discret rappeur de Paris sud a fait son grand retour le 6 juin dernier… au cinéma, pour la sortie de son nouvel album Les Étoiles Vagabondes. Le processus et inédit : un documentaire éponyme à séance unique dans une centaine de salles de l’hexagone ainsi que dans de nombreux pays francophones, suivi de la sortie, dans la foulée, du nouvel opus sur toutes les plateformes de streaming. Le fennec a fait les choses en grand. Le documentaire retrace tout d’abord le processus de création de l’œuvre ; du syndrome de la page blanche aux différents voyages à travers le monde (Tokyo, Los Angeles, La Nouvelle Orléans, son île de Mytilène en Grèce) qui lui redonnent l’inspiration nécessaire à l’écriture de son troisième album solo. En ce qui concerne l’album, réussi mais à la fois surprenant tant Nekfeu s’essaye à de nouvelles musicalités, il laisse, à l’issue de l’écoute, un petit gout d’inachevé et semble finalement incomplet. Cependant, moins de deux semaines plus tard, les théories de double-album qui fleurissaient sur la toile s’avèrent justes ; Nekfeu revient avec Les Étoiles Vagabondes : Expansion. Un double-album donc de trente-quatre titres où les nouveaux morceaux s’insèrent au milieu de ceux sortis précédemment, pour nous offrir l’œuvre finale. Résultat : le projet s’avère plus cohérent et donc plus abouti. Avec ce retour, Nekfeu nous livre le plus mélancolique de ses albums mais peut-être également le plus accompli en termes de réflexion, d’écriture et surtout de musicalité. Installé au sommet du rap français depuis quelques années désormais, le Nekfeu termine l’année au sommet des ventes du rap français, avec à ce jour près de 440 000 ventes, s’approchant ainsi de plus en plus de son troisième disque de diamant. En espérant que le rappeur de l’Entourage ne tarde pas trop à revenir cette fois-ci.

Enfin, le 11 octobre 2019, Vald nous a gratifié de son troisième album studio, Ce monde est cruel. Pour la promotion de cet album plus conscient que jamais, le rappeur de 27 ans a mis les petits plats dans les grands, n’hésitant pas à réaliser sa promotion sur les écrans de géants de Shibuya à Tokyo, des buildings de Dubaï et de Times Square à New-York ; soit « dans des pays où (il) ne vend pas de CD » comme il le dit si bien. Bien plus sérieux qu’à l’accoutumée, le rappeur d’Aulnay-Sous-Bois nous livre, à travers les seize titres de l’album, une dénonciation de la société de consommation contemporaine ainsi que des systèmes sociaux établis, le tout à grands coups de second degré qui sonne cependant terriblement juste et efficace. Il porte notamment un regard ultra-lucide sur la situation au détour de punchlines drôles mais à la fois désolantes, qui ont finalement le don de s’avérer terriblement puissantes. Sur cet album, on se rend compte que Vald n’est absolument pas à la recherche d’un tube ; le seul et unique single dévoilé au préalable étant Journal Perso II, un titre sur une boucle de piano lente et mélancolique, où il nous plonge directement dans le thème de l’album ; constatant de façon très juste toutes les injustices de la société qui nous entoure. La direction artistique pouvait paraître surprenante mais elle s’avère finalement réussie. Sur ce projet, Vald casse également les stéréotypes de la vie luxueuse dont jouiraient les artistes, même s’il concède qu’en être un – en l’occurrence un rappeur – à ses avantages, notamment avec les femmes. Il nous évoque également la thématique de l’argent pour en tirer un paradoxe très pertinent : c’est aux gens les plus riches que l’on offre le plus, les plus démunis étant destinés à l’invisibilité. Entouré de SCH sur les titres Halloween et Dernier Retrait, de Maes sur ASB ainsi que son fidèle acolyte Suikon Blaz AD sur NQNTMQMQMB, Vald nous a gratifié d’un album différent des précédents mais non moins réussi.


Ils ont aussi fait 2019 :

- Prince Waly – B O Y Z
- Kaaris – Or Noir 3
- Lacrim – Lacrim
- 4 Keus Gang – L'histoire d'un gang
- Djadja & Dinaz – Drôle de mentalité
- Jok'Air – Jok'Travolta & La fièvre
- RK – Rêves de gosses
- Zola – Cicatrices
- Dosseh – VIDALO$$A 4.5 & Summer Crack Vol. 4
- Alonzo – Stone
- Roméo Elvis – Chocolat
- Columbine – Adieu, au revoir
- Koba LaD – L'Affranchi
- Gims – Transcendance
- Bolémvn – Salut les terriens
- Lord Esperanza – Drapeau blanc
- Guizmo – GPG 2
- Hayce Lemsi – Écorché vif
- Lorenzo – Sex in the City
- Oxmo Puccino – La nuit du réveil
- Black M – Il était une fois
- Niro – Stupéfiant : Chapitre 1 & 2 & 3
- Diddi Trix – Cartel de Bondy
- DTF – On ira où ?
- Lary Kidd – Surhomme
- Alkpote – Monument
- Soprano – Du Phoenix aux étoiles
- IAM – Yasuke
- Gradur – Zone 59
- Doums – Pilote & Co

Article rédigé par C. LEFEBVRE.

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